Ces illustres inconnus : Perrot de Verdun et Etienne François Raymond Pouchelon
Quelques personnalités romanaises sont restées dans les mémoires et les noms de rues, de places et de bâtiments. Mais savons-nous qui elles étaient ? Cinquième volet de cette série (voir 1, 2, 3 et 4).
Perrot de Verdun
Riche bourgeois de Romans, élu consul le 6 juillet 1370, doit d’autant plus figurer au premier rang parmi les bienfaiteurs de cette ville que, par son testament en date du 27 juillet 1374, il consacra, bien que marié et père de trois filles, la plus grande partie de sa fortune à des oeuvres de charité ou d’intérêt public. Ainsi laissa-t’il, indépendamment de quantité d’autres legs, 300 florins pour marier cent filles pauvres de Romans, 100 florins pour marier trente pauvres filles de Valence, 100 florins pour la reconstruction du pont de Romans sur l’Isère, enfin, plusieurs maisons dont l’une a servi pendant 400 ans d’hôtel de ville (rue de l’Armillerie), et tous les cens et rentes en grains et en argent qu’il percevait en différents lieux, aux consuls de Romans, pour le produit en être distribué chaque année aux pauvres, sous forme de pain cuit, le dimanche après l’Ascension.
Ce dernier legs donna lieu à une fondation, dite Aumône ou donne de Perrot de Verdun, qui disposait, en 1408, de 73 setiers de blé, 64 florins d’or et 63 livres tournois de revenu annuel, abstraction faite du produit de donations faites par d’autres personnes. Unis à ceux de l’Aumône générale, en 1555, les revenus de cette fondation furent absolument attribués à l’hôpital de Romans, en 1740. Mais les administrateurs de cet établissement n’en continuèrent pas moins, jusqu’à la Révolution, à faire distribuer chaque année, le jour dit, une certaine quantité de pain, de soupe et même quelquefois de viande et de vin, “pour honorer la mémoire de ce bienfaiteur et faire prier pour son âme.”
Aujourd’hui encore, on voit, dans la salle d’accueil des Archives municipales, un grand portrait en pied, au bas duquel est le quatrain suivant :
Les consuls de Romans vous donnent le visage
De Perrot de Verdun naïfvement portraict
Afin que vos nefveux conservent de âge en âge
Sa mémoire ainsi que le bien qu’il vous a faict.
Au-dessous on lit :
Fait l’an MDCXV, d’après son portraict de l’an MCCCLXXI, au consulat de Mons, Mre Jean Paul Bruiere advocat, Mre André Chabrant procureur, Henri Joseph Périer drapier, et Claude Robin Grobat.
Seulement, il faut bien dire que si ce tableau est, quant aux traits, la reproduction d’un portrait de Perrot de Verdun, il ne l’est certainement pas quant au costume, qui est celui d’un riche bourgeois de la fin du XVIè siècle. Or, ce portrait de l’an 1371 est probablement celui dont il est question dans une délibération consulaire du 27 octobre 1585, autorisant Pierre de Claveyson à faire réparer la chapelle des Cordeliers où est la sépulture de Perrot de Verdun, à la condition de respecter les fondations antérieures et “le tableau de la sépulture dudit de Verdun.”
Une place porte aujourd’hui son nom à Romans-sur-Isère.
Etienne François Raymond Pouchelon
Né à Romans-sur-Isère le 25 octobre 1770, d’Etienne Pouchelon, notaire, et de Madeleine Fayolle, il se préparait à être notaire à son tour, quand, cédant à l’entraînement général, il s’engagea dans un bataillon de volontaires de la Drôme, où il fut élu sergent-major, le 12 octobre 1791, et avec lequel il fit campagne à l’armée des Alpes.
Devenu quartier-maître trésorier d’une compagnie de canonniers volontaires, le 29 juin 1793, il passa, le 19 janvier suivant, dans la 118è demi-brigade, faisant alors partie de l’armée d’Italie, ce qui le mit à même de combattre à Montenotte, à Lodi, à Rivoli et sur le Tagliamento, puis de faire partie de l’expédition d’Egypte. Dans le cours de cette dernière campagne, il assista à la prise de Malte, à celle d’Alexandrie où il fut fait capitaine, le 7 juillet 1797, à la bataille des Pyramides et au siège de Saint-Jean-d’Acre. Blessé d’un coup de feu, le 30 mars 1798, sa conduite devant Alexandrie lui fit donner le grade de chef de bataillon, le 28 mars 1800.
Revenu en France peu de temps après, Pouchelon obtint, le 8 décembre 1802, le grade de major avec lequel on l’envoya au camp d’Ostende. Chargé ensuite de commander un régiment provisoire de dragons, à la tête duquel il combattit à Iéna le 14 octobre 1806, il passa au commandement du 33è de ligne, dont il devint colonel en titre le 7 janvier 1807, cette nomination étant la récompense de sa belle conduite à Nazielsk en Pologne, où il avait été blessé quatorze jours auparavant. Six mois plus tard, la rosette d’officier de la Légion d’honneur était le prix de la bravoure dont il fit preuve à la bataille de Friedland, de même que les étoiles de général de brigade, qu’il reçut le 8 octobre 1812, furent celui des services endus par lui à Eckraùhl, à Wagram et pendant la campagne de Russie.
Ayant ensuite fait la campagne de Saxe, le nouveau général fut blessé à Leipzig, le 18 octobre 1813, ce qui l’obligea à prendre quelque repos, mais ne l’empêcha pas de commander bientôt après une brigade de la division Musnier. Retraité, quand même, par le gouvernement de la Restauration, le 7 octobre 1810, il obtint de celui de Louis-Philippe le commandement du département de la Drôme, le 6 décembre 1830, et même fut rappelé tout à fait à l’activité le 22 mars 1831. Mais il mourut à Romans-sur-Isère, le 3 septembre de la même année.
Une rue, une école élémentaire et un gymnase portent aujourd’hui son nom à Romans-sur-Isère.
Source : Dictionnaire Biographique de la Drôme, Justin Brun-Durand, 1836