Les halles Jules Nadi
Le 10 septembre 1874, sur la proposition de M. Léon Barracand, maire de Romans-sur-Isère, “le Conseil municipal émet à l’unanimité le voeu qu’un marché couvert, dont l’urgence et l’utilité sont incontestables, soit établi le plus promptement possible et décide qu’une commission fera un rapport sur le lieu qui paraîtra le plus convenable à son établissement.”
Ce n’est que le 11 novembre 1875 que l’on reparlera de cette idée lorsque M. Barracand proposera “la création d’un marché couvert sur l’emplacement du marché aux chevaux qu’on transférerait avec avantage sur la place d’Armes.” Le Conseil, “sans vouloir entrer dans la discussion de ce projet qui lui paraît sans utilité, à l’unanimité passe à l’ordre du jour.”
Le projet est définitivement enterré jusqu’au 29 février 1920, quand M. Jules Nadi, maire de Romans-sur-Isère, expose au Conseil municipal que “l’établissement d’une halle à Romans-sur-Isère est indispensable et rendra de très grands services à la population. Elle permettra la tenue des marchés d’alimentation par tous les temps. L’emplacement qui paraît le plus propice est le terrain appartenant à la Caisse d’Epargne, rue Sabaton, et qui était autrefois destiné à la construction du nouvel hôtel de cet établissement.”
Le 3 mars, un accord est conclu entre la Municipalité et l’administration de la Caisse d’Epargne pour la cession à la ville, moyennant le prix forfaitaire de 140 000 francs (environ 124 000 € actuels), de l’emplacement rue Sabaton. Le 28 juillet, M. Raphaël Dome, architecte-voyer de la ville, dresse un projet s’élevant à 450 000 francs (environ 400 000 € actuels), hors prix d’achat de l’emplacement.
Le 15 juillet 1921, il est décidé “de procéder le plus rapidement possible à la construction de la halle et de se procurer les ressources nécessaires pour faire face à la dépense au moyen d’un emprunt au Crédit Foncier. Cet emprunt est contracté au taux d’intérêt de 8% et remboursé en 40 années à partir du 1er janvier 1922.”
La construction de la halle est autorisée par les décrets du 11 mars et du 4 mai 1922.
En novembre 1924, “une délégation municipale se rend à Grenoble et à Avignon pour étudier sur les lieux l’organisation des halles de ces villes, et un projet de règlement est établi. Il prévoit que la cession des emplacements sera faite aux enchères publiques pour une durée de 3 ans. Un emplacement sera réservée pour la vente des boissons chaudes suivantes : café, lait, chocolat, bouillon, etc.”
La halle de Romans-sur-Isère est inaugurée le 1er janvier 1925 et ouvre ses portes au public le 1er mars 1925 après quelques heurts.
En effet, le 28 février, certains protestent contre la méthode employée à la construction de la halle et le maire est pris à parti : “Vous avez voulu doter Romans-sur-Isère d’un marché couvert avec les avantages modernes afférants à une halle. Plusieurs fois, vous avez convoqué le syndicat de la boucherie afin d’obtenir une diminution du prix des viandes. Ces messieurs vous ont fait observer qu’ils étaient obligés de tenir compte dans leurs prix de vente des pertes qu’ils éprouvaient par suite de la mauvaise conservation de la viande. Vous avez dit à ces messieurs que dans la halle en construction, il y aurait une chambre froide et que moyennant une redevance, ils pourraient y entreposer leur marchandise. Qu’est ce que cette halle ? C’est un colosse aux pieds d’argile qui a été rongé par les rats de la voirie municipale.”
Puis, il est demandé au Maire si “le cahier des charges prescrit que nous devions recevoir une halle dont la façade sud est toute lézardée et dont le glacis présente beaucoup de cassures.”
Malgré tout, la halle est ouverte et le règlement y est très strict : “Les commerçants se livrant à la vente des viandes, des poissons et des produits maraîchers ne pourront exercer ce commerce que dans l’enceinte de la halle qui sera ouverte les jours de marché de 7 h à 14 h, les vendredis jusqu’à 16 h, les samedis jusqu’à 18 h, les dimanches et jours de fêtes légales, elle sera fermée à midi. L’entrée de la halle est interdite à tous marchands ambulants, musiciens et saltimbanques. Il est défendu aux détaillants d’annoncer par des cris la nature et la valeur des marchandises, d’aller au devant des passants ou de les tirer par leurs vêtements. Il est défendu de laisser séjourner sur le sol des marchandises avariées, des débris de viandes, des vidanges de volailles et de poissons. Les places et étaux devront être constamment tenus dans le plus grand état de propreté. Les bouchers, charcutiers et poissonniers devront laver leur matériel chaque jour.”
La halle de Romans-sur-Isère a définitivement fermé ses portes en septembre 2000 et, depuis lors, les locaux sont restés en l’état (voir le reportage photo).
Sources : Archives municipales de Romans-sur-Isère, 1 D 17 – Délibérations municipales 1871-1877, pp. 213 et 351; 1 D 31 – Délibérations municipales 1919-1921, pp. 109, 113, 171 et 333 ; 1 D 33 – Délibérations municipales 1924-1926, pp. 16, 87 et 88