Une comédie en trois actes : Les regrets du carneval
L’objet que nous présentons cette semaine est un manuscrit de 73 pages intitulé “Les regrets du carneval”, adressé à “Monsieur l’abbé de Lesseins” et signé “Votre très humble et très obéissant serviteur Lavie”.
Nous ne savons malheureusement pas qui portait le pseudonyme de Lavie mais cette comédie en trois actes a été écrite du vivant de Charles de Lionne, abbé de Lesseins et sacristain de la collégiale Saint-Barnard de Romans, richissime romanais, esthète et collectionneur d’art mort en 1701 dans son Hôtel des Allées (aujourd’hui occupé par le monastère de Sainte-Claire), dans le but de se moquer de lui comme le montrent quelques extraits du préambule qui s’adresse directement à Charles de Lionne : “Les regrets de notre carneval, sans doute, vous feront pitié et vous aurez compassion de cette pièce que j’ai immolée comme une victime à votre censure et à votre raillerie.”, “J’avoue, Monsieur, que c’est manquer de jugement et avoir l’esprit léger de présenter des bagatelles à une personne de votre poids.”, et “Votre bonté excusera la bassesse de mon ouvrage si mal proportionné à la grandeur de votre illustre naissance et à la délicatesse de votre jugement.”
Les personnages intervenant dans cette comédie sont dénommés Gorgibus, Palatin, Doris, Mélinte, Dorante, La Tronche, Cithérée, Cupidon, Célimène, Brave Jacques, et Torpin.
Passé par la bibliothèque de Charles Delacour
Cet ouvrage porte la signature de Charles Delacour ce qui signifie qu’il a fait partie de sa bibliothèque personnelle pendant un temps.
Charles-Claude Delacour d’Ambézieux, est né à Romans en 1730 et fut avocat, colonel de la Garde nationale, député et secrétaire de l’Assemblée nationale constituante de 1789, et président du tribunal du district de Romans. Pendant la Révolution française, les romanais se rendaient, au son de la cloche, dans l’église des Cordeliers, devenue propriété nationale, pour écouter la lecture des bulletins de l’Assemblée nationale. C’est ainsi que le 30 décembre 1789, il fut décidé de porter en triomphe les portraits des députés romanais Charles-Claude Delacour d’Ambézieux et Claude-Pierre Dedelay d’Agier. Delacour d’Ambézieux est mort à Romans le 22 septembre 1792, sans avoir été marié, et inhumé le lendemain dans le cimetière de Sainte-Foy, à l’emplacement de l’actuelle place Ernest Gailly. L’immeuble d’habitation qu’il possédait est toujours visible rue Pêcherie et chose amusante dans le contexte de l’ouvrage que nous présentons, c’est Charles de Lionne qui avait fait don de cet immeuble à la famille Delacour !
Plus de collégiale Saint-Barnard sans Charles de Lionne
Avant de conclure, empressons-nous de rendre grâce à Charles de Lionne pour avoir restauré presque entièrement la collégiale Saint-Barnard qui avait été ruinée par les protestants pendant les Guerres de religion. En effet, les chanoines avaient protégé le choeur de l’église mais la nef était totalement découverte et soumise aux intempéries pendant une centaine d’années avant que Charles de Lionne n’intervienne, dépensant une bonne partie de sa fortune, pour faire des travaux de restauration. Sans lui, la collégiale Saint-Barnard serait tombée en ruines depuis longtemps !
Si vous possédez des documents ou des objets relatifs à l’histoire de Romans, et si vous souhaitez que nous les présentions à nos lecteurs, n’hésitez pas à nous contacter à l’adresse jyvesbaxter@gmail.com
Cet article est aussi paru dans le Dauphiné Libéré : https://www.ledauphine.com/culture-loisirs/2024/12/07/une-comedie-en-trois-actes-les-regrets-du-carneval