Les curés des trois paroisses contre les inhumations dans l’enceinte du couvent des Cordeliers, en 1781
Les désagréments qu’a si souvent occasionné l’abus de sépultures dans les lieux fréquentés ont donné lieu à la déclaration du roi Louis XVI, du 10 mars 1776, concernant les inhumations.
Cette loi a pourvu à la sûreté publique en restreignant à un petit nombre de personnes privilégiées le droit d’être inhumées dans les églises, chapelles ou cloîtres, en subordonnant cette prérogative à l’observation rigoureuse des précautions qu’elle prescrit et en ordonnant la translation des cimetières hors de l’enceinte des habitations.
Jusqu’alors, à Romans-sur-Isère comme ailleurs, l’on inhumait les morts un peu partout dans l’enceinte de la ville : à l’intérieur et autour des églises (Saint-Barnard, Saint-Nicolas, Saint-Romain), dans les monastères et couvents (Cordeliers, Visitation Sainte-Marie, Sainte-Claire, Sainte-Ursule, Capucins, Saint-Just), dans les hôpitaux (Charité puis Hôtel-Dieu, Sainte-Foy dont le cimetière était sur l’actuelle place Ernest Gailly).
Il faudra encore attendre quelques dizaines d’années pour que la ville soit entièrement “vidée” de ses sépultures et que l’on enterre les morts dans le cimetière Saint-Romain, situé rue Calixte Lafosse et agrandi plusieurs fois pour répondre au besoin sans cesse croissant d’espace.
La déclaration du roi Louis XVI, du 10 mars 1776, marquait une grande avancée dans la gestion des cimetières et de l’hygiène publique, et nombreux y répondirent favorablement, à l’exemple des curés des trois paroisses de Romans : Saint-Barnard, Saint-Nicolas et Saint-Romain.
Mais d’autres voulurent résolument sauvegarder leurs avantages. Ce fut le cas des Cordeliers qui se sont pourvus à la cour par différentes requêtes et obtinrent, le 15 mars 1780, une ordonnance qui leur permettait de faire enterrer dans l’emplacement des cloîtres de leur monastère, désigné dans le certificat du lieutenant-général de police de Romans du 23 août 1779, cinq familles dont les noms ont été retenus par ladite ordonnance et vingt-quatre confrères du tiers-ordre de Saint François dont les noms seront inscrits sur un tableau et qui pourront être remplacés au décès de l’un des confrères.
Le 17 juillet 1780, les curés des trois paroisses de Romans, dont les droits étaient blessés par la prétention des Cordeliers, furent reçus par la cour afin de former opposition à cette ordonnance.
Quelques extraits de cette requête donnent une description très intéressante du couvent des Cordeliers (sur l’emplacement de l’actuelle place Jules Nadi) et des conditions d’hygiène de cette époque :
“La ville de Romans est bâtie sur une colline en forme d’amphithéâtre et la partie nord, très élevée, vient se joindre par une pente assez raide à celle du midi.
Le couvent des Cordeliers est presque au bas de la colline et à peu près au centre de la ville, sur un terrain plat. On y arrive par une vaste cour plantée d’arbres qui sert de passage et de promenade au public. A droite, à l’extrémité orientale de cette cour, est l’église, édifice spacieux et élevé; à gauche, la chapelle des pénitents et les bâtiments qui en dépendent; au milieu, un vestibule fermé par une grille de fer, au fond duquel est la porte d’entrée du cloître.
On trouve quatre autres portes dans ce cloître; deux communiquent à l’église, la troisième au jardin et la quatrième, aux appartements intérieurs de la maison; ces portes sont toujours très exactement fermées.
Le cloître est composé de quatre galeries voûtées qui, par leur contiguïté, n’en forment à proprement parler qu’une seule qui environne un petit préau à ciel ouvert, au milieu duquel est un grand arbre.
Tout autour de ce préau est un mur à hauteur d’appui, très épais, sur lequel prennent naissance les piliers en maçonnerie des arcs qui éclairent les galeries du cloître et en soutiennent les voûtes; et sur les murs de ces galeries, du côté opposé aux arcs, s’élèvent des bâtiments très exhaussés qui entourent le préau de toutes parts.
On prétend, et tout concourt à confirmer cette opinion, que la source de la fontaine publique dite des Cordeliers, passe à peu de profondeur, sous le préau en question ou au voisinage, et les citoyens qui habitent près de cette fontaine sont justement alarmés de ce que les religieux veulent établir un cimetière dans le terrain qui en renferme la source.
Ce préau est un lieu renfermé, étroit, profond, humide, presque inaccessible à l’action des vents et dont les écoulements très abondants dans les temps de grande pluie doivent nécessairement se mêler avec la plupart des sources nombreuses qui couvrent le plan intérieur du sol de ce quartier de la ville, et qui fournissent de l’eau aux habitants qui sont au-dessous.
C’est cependant dans ce préau que les Cordeliers veulent placer un cimetière, dans le temps où l’on s’occupe partout du soin d’éloigner les sépultures de l’enceinte des habitations; c’est-à-dire, en deux mots, qu’ils veulent infecter, dans cette ville, les deux éléments les plus nécessaires à la vie : l’air et l’eau.
Les curés ne sont pas jaloux du bien-être des Cordeliers : que ces religieux jouissent en paix des douceurs de la vie que leur procure leur fortune ! Mais qu’ils cessent d’empiéter sur les droits des curés. Qu’ils cessent surtout d’exposer, par une innovation dangereuse et proscrite par la loi, la vie et la santé d’une multitude d’habitants qui sont infiniment chers à leurs pasteurs.”
Source : Archives municipales de Romans-sur-Isère ; 1 FLR 1105 – Observations pour les Sieurs Curés des trois Paroisses de la ville de Romans, servant de Réponse à l’écrit, intitulé : Mémoire, qui leur a été signifié le 31 Mai 1781, de la part des RR. PP. Cordeliers de la même Ville – 1781.
Pour commencer, je vous conseille le dernier ouvrage de l’association de Sauvegarde du patrimoine romanais-péageois intitulé “Romans, une ville qu’on aime”.
Voir ici http://www.romansmag.fr/articles/patrimoine/romans-une-ville-qu-on-aime-389.htm
Vous le trouverez à l’Office de Tourisme et à la librairie des Cordeliers.
vraiment très intéressant.i ln existe pas un livre plus détaillé sur la ville de romans